19/03/15

Des universités ouest-africaines s’attaquent à la pollution

Africa Urban Pollution
Crédit image: Flickr/transportinafrica

Lecture rapide

  • Une chaire "ecosanté" vient de voir le jour dans des universités de quatre pays
  • Les recherches vont fournir des statistiques aux gouvernants et décideurs
  • Une subvention de 600 millions de FCFA est disponible pour soutenir le programme.

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Quatre universités ouest-africaines viennent de lancer ensemble une chaire écosanté consacrée à la pollution de l’air et aux maladies non transmissibles respiratoires.

Elle a été officiellement lancée le 26 février dernier à Cotonou (Bénin) à l’occasion d’un atelier marquant le démarrage des recherches à effectuer dans les quatre différents pays concernés.

L’objectif est de former des spécialistes dans ce domaine pour améliorer la compréhension des problèmes liés à la pollution urbaine de l'air en Afrique de l’Ouest.

Ce programme d’enseignement et de recherche collaboratif concerne les universités d’Abomey-Calavi au Bénin, Cheikh Anta Diop au Sénégal, Ouagadougou au Burkina Faso et Félix Houphouët Boigny en Côte d’Ivoire.

"Nous voulons former des professionnels sur la pollution de l’air et des maladies non transmissibles respiratoires à travers les principes de l’"écosanté" pour permettre de collecter des données sur l’état de la santé de nos populations", précise Benjamin Fayomi, Doyen de la Faculté des Sciences de la santé (FSS) de l’Université d’Abomey-Calavi, et titulaire de cette chaire au Bénin.

SciDev.Net a appris que le programme est dédié aux activités de recherches, de formation, de sensibilisation et de diffusion des données relatives à la pollution de l’air en Afrique de l’Ouest.

Les activités de recherche transdisciplinaire porteront, entre autres, sur les différents polluants de l’air, leurs sources (naturelles et temporelles), leurs niveaux et variabilités temporelles et spatiales dans les villes ouest-africaines.

“Cette chaire vise à contribuer au développement du domaine de l’"écosanté" dans la sous-région ; notamment en améliorant la compréhension de la pollution urbaine et de ses impacts sur les maladies non transmissibles respiratoires.”

Benjamin Fayomi, Doyen de la Faculté des Sciences de la santé (FSS) de l’Université d’Abomey-Calavi (Bénin)

Le volet intervention s’appuiera sur un programme dénommé "air-sain" pour sensibiliser toutes les couches socio-professionnelles et les populations sur la pollution de l’air.

Le volet formation comprend un Programme Doctoral Interuniversitaire (PDI) de santé publique en "Ecosystèmes, Santé et Développement Durable" en vue de former une "masse critique de ressources humaines bien outillées en écosanté".

Les résultats des recherches des étudiants permettront de sensibiliser les gouvernants et les populations sur la protection de l’environnement.
 

Répercussions sur la santé

 
Ce volet prévoit aussi l’organisation d’ateliers de courte durée pour renforcer les capacités des professionnels de la santé, des acteurs des ONG du secteur de l’environnement, des chercheurs et des étudiants sur la thématique de la pollution de l’air, des changements climatiques et des maladies non-transmissibles respiratoires.

Benjamin Fayomi a indiqué à SciDev.Net que ce programme va permettre de voir plus clair dans la pollution de l’air et ses répercussions sur la santé en Afrique de l’Ouest.

"Cette chaire vise à contribuer au développement du domaine de l’"écosanté" dans la sous-région ; notamment en améliorant la compréhension de la pollution urbaine et de ses impacts sur les maladies non transmissibles respiratoires", dit-il.
Ajoutant qu’elle va permettre de mettre en place des stratégies de prévention à base communautaire ; "ceci dans le but de créer un environnement urbain plus sain, vivable et durable".

Ces différentes activités qui seront mises en œuvre pendant 5 ans, bénéficient d’une subvention d’environ 600 millions de francs CFA (soit 1,2 million de dollars) offerte par le Centre de recherches pour le Développement International (CRDI), un organisme canadien d’aide au développement.

Le CRDI appuie, depuis 2007, un peu partout en Afrique, des recherches ponctuelles dans le domaine de l’"écosanté" pour améliorer le bien-être des populations, notamment des communautés les plus vulnérables.

La pollution de l’air, à l’intérieur des bâtiments comme à l’extérieur est due aux usines qui rejettent des déchets nuisibles pour l’environnement et la santé, aux motos et véhicules émettant des gaz toxiques dans l’atmosphère, à l’utilisation anarchique des engrais chimiques et des pesticides et à l’utilisation du charbon et du bois pour la cuisine à l’intérieur des maisons.
 

Mesurer la pollution

 
Cette pollution est responsable de nombreuses maladies qui réduisent la durée de vie des populations ; notamment les infections respiratoires aigües, les maladies cardio-vasculaires.

En 2012, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la pollution atmosphérique, combinée à la pollution de l’air à l’intérieur des maisons, est responsable de plus de 7 millions de décès à travers le monde.

Thierry Baldet, Spécialiste de programme principal agriculture et environnement au CRDI, a expliqué à SciDev.Net que face à l’ampleur du phénomène qui s’accentue avec l’urbanisation galopante, il est important aujourd’hui de mesurer la pollution pour avoir des données scientifiques fiables à mettre à la disposition des décideurs et des pouvoirs publics en vue de mener des actions pour protéger les populations.

A l’en croire, en dehors de quelques informations générées par certains projets parcellaires menés par exemple à Dakar (Sénégal), il n’existe pas assez de données qui puissent aider véritablement à prendre la mesure de la pollution à l’échelle de la sous-région afin de la contrôler.

En Afrique subsaharienne pourtant, 27 pays ont adopté des lois sur la protection de l’environnement qui précisent les paramètres du carburant des véhicules et les normes d’émission des gaz par les industries.

Dans la plupart de ces pays, il existe aussi des systèmes opérationnels de surveillance de la qualité de l'air. Mais en Afrique de l’Ouest, apprend-on, seul le Ghana dispose d’un système de surveillance de routine opérationnelle.

La gestion de la qualité de l’air est totalement absente dans la plupart des pays où les gouvernants se contentent de prendre des mesures qui ne contribuent pas de manière significative à améliorer la qualité de l’air.

D’où la réflexion du ministre béninois de l’Environnement, Raphaël Edoun, qui pense qu’il faut disposer de données chiffrées fiables sur la pollution de l’air et ses effets pour aider les décideurs à prendre des mesures adéquates dans les grandes villes.