04/03/15

Un germe menace la survie des grenouilles de Madagascar

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La survie des grenouilles de Madagascar préoccupe la communauté scientifique Crédit image: Rivonala Razafison

Lecture rapide

  • Les chercheurs ont examiné un échantillon de 4 150 amphibiens
  • Le champignon pourrait accélérer l’extinction de 500 espèces de grenouilles
  • Un plan de sauvetage a été élaboré et sera validé ce mois de mars.

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[ANTANANARIVO] Alors qu’ils en avaient douté jusque-là, des chercheurs viennent de confirmer la présence à Madagascar du chytride, un champignon connu pour avoir précipité le déclin de la population d’amphibiens en Amérique centrale, en Australie, dans l’ouest des Etats-Unis, en Europe et en Afrique de l’Est.

L’information est contenue dans un article intitulé "Widespread presence of the pathogenic fungus Batrachochytrium dendrobatidis in wild amphibian communities in Madagascar" publié dans le journal Scientific Reports du 26 février 2015.

Cet article détaille les résultats de l’étude menée par une équipe internationale qui a examiné la santé de plus de 4 150 amphibiens dans tout le pays et a confirmé la présence du champignon sur cinq différents sites.

"Nous n’avons révélé sa présence sur notre sol que présentement parce que des vérifications nécessaires ont eu lieu ces trois dernières années", précise Falitiana Rabemananjara, secrétaire exécutif de l’"Amphibian Specialist Group Madagascar" pour l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et coordinateur de la Cellule d’urgence chytride du pays.

Mais, il se pourrait que le champignon ait existé depuis longtemps à Madagascar, selon ce co-auteur de l’article.

En effet, la présence sur la Grande Ile de ce germe qui est le vecteur d’une maladie mortelle pour les grenouilles a été soupçonnée depuis 2010 dans le massif de Makay, une zone reculée située dans l’ouest du pays.

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Une des espèces de grenouille vivant sur l'île de Madagascar

D’ores et déjà, les scientifiques redoutent que la maladie puisse aussi accélérer l’extinction d’environ 500 espèces de grenouilles de Madagascar, représentant 9 % des espèces d’amphibiens de la planète.

Dans un communiqué, les conversationnistes avec les experts de l’"Amphibian Survival Alliance" (ASA) font d’ailleurs part de leur profonde préoccupation.

"L’éventuelle disparition des grenouilles malgaches n’est pas seulement importante pour les spécialistes de l’herpétologie et de l’amphibologie. Ce serait aussi une grande perte pour le monde entier", avertit pour sa part Franco Andreone, co-président de l’"Amphibian Specialist Group Madagascar" et co-auteur de l’article.

"Nous savons que c’est une mauvaise nouvelle. Mais nous pouvons encore prévenir la disparition massive des grenouilles malgaches comme nous l’avons vu dans d’autres pays", rassure Reid Harris, co-auteur de l’article et directeur de l’"International Disease Mitigation" au sein de l’ASA.

En attendant, la prudence est de mise chez les scientifiques qui cherchent encore à savoir s’il s’agit réellement du même champignon responsable de l’extinction du tiers des amphibiens mondiaux.

"Il se pourrait bien que l’espèce présente chez nous ne soit pas mortelle pour nos grenouilles malgré sa prolifération. Cette observation ne doit toutefois être prise pour vraie qu’après des investigations plus poussées", mentionne Falitiana Rabemananjara.

Cette dernier remarque en effet que les fortes précipitations observées durant la saison chaude (octobre-avril) contribuent à la diminution du taux de propagation du champignon et de ses manifestations sur le corps des grenouilles.

Sauf qu’en revanche, la fraîcheur de l’hiver déclenche le phénomène inverse.

En réponse, une soixantaine d’experts nationaux et internationaux ont élaboré En novembre 2014 un nouveau plan pour sauver les amphibiens de Madagascar, appelé ACSAM2, avec l’appui financier du "Durrell Wildlife Conservation Trust".

Cette nouvelle stratégie de conservation annonce des mesures préventives contre le chytride et les actions à lancer pour contenir sa virulence.

Ce qui fait dire à Reid Harris que ceux qui œuvrent pour la conservation mondiale prennent déjà le taureau par les cornes en mettant en pratique les expériences réussies comme celle menée en Amérique centrale.

La validation du plan, suivie de son officialisation, aura lieu au cours de ce mois de mars 2015, en vue de bien gérer la situation actuelle.