11/05/11

Un projet égyptien de super-autoroute suscite des interrogations

Le manque de ressources d'eau renouvelable est susceptible dʹentraver le développement du projet Crédit image: Flickr/divya_

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[LE CAIRE] Les critiques égyptiens ont mis en cause un projet ambitieux de développement du corridor du Nil, suite à l’annonce par le gouvernement, le mois dernier (12 avril), des plans du projet de 24 milliards de dollars américains (18 milliards d’euros).

Ce projet, ‘The Development Corridor in the West of the Nile Valley’, vise à construire une super-autoroute de 1 200 km le long du Nil, dans le désert Libyque, qui relierait El Alamein à Assouan, et qui serait accompagnée de lignes de chemin de fer, de canalisations d’eau et de lignes électriques.

Des scientifiques égyptiens reconnus ont mis en cause la faisabilité technique du projet et préconisé des recherches supplémentaires avant sa mise en œuvre. Ils ont mis en avant le fait qu’ailleurs, des mégaprojets similaires avaient échoué mais aussi que le manque de sources d’eau renouvelable conduirait ce projet à l’échec.

Farouk El-Baz, géologue à l’Université de Boston, aux États-Unis, a indiqué à SciDev.Net que ce projet, qu’il a conçu, allait changer le visage de l’Égypte et ouvrir de nouvelles perspectives pour la croissance urbaine, agricole et industrielle.

D’après lui, "environ 30 000 feddans [126 kilomètres carrés] de terres fertiles de la Vallée du Nil sont perdues chaque année au bénéfice des villes, alors qu’il est prévu que la population augmente de 60 millions d’ici 2050".

Ismail Serageldin, Président de la Bibliothèque d’Alexandrie et ancien vice Président de la Banque mondiale, a déclaré que "dans le monde, quelques projets [de ce type] sont une réussite" mais beaucoup dépassent le budget qui était estimé.

Maghawry Diab, hydrologiste et ancien Président de l’Université Menofia, a signalé que les eaux souterraines les plus proches étaient situées à environ 1 000 m en-dessous de la surface, et qu’il n’est donc pas économiquement faisable de les exploiter.

Rashad El Bayoumi, Professeur de géologie à l’Université du Caire, a également indiqué à SciDev.Net que la nappe d’eau souterraine du Désert Libyque n’était pas renouvelable, ce qui signifie que ce projet "sera réduit à néant" dès que la ressource en eau sera épuisée.

Selon F. El-Baz, ces obstacles peuvent toutefois être surmontés. L’eau destinée à être consommée par les hommes pourrait être acheminée depuis les Lacs de Toshka par une nouvelle canalisation, et les activités agricoles pourraient être restreintes aux zones où il a été prouvé que les eaux souterraines étaient renouvelables.

Le gouvernement a également répondu aux critiques en indiquant qu’il allait nommer deux comités de surveillance composés dʹexperts afin de superviser la mise en œuvre du projet ; il a également annoncé qu’une conférence serait organisée avant la fin de l’année pour discuter ouvertement de ce projet.

Les travaux sur le projet commenceront au cours des six prochains mois et devrait durer moins de dix ans.

F. El Baz a suggéré qu’au départ, le projet soit financé par des obligations offertes à la population égyptienne, les "propriétaires" du projet, mais la provenance des 24 millions de dollars américains (18 milliards d’euros) estimés par l’étude de faisabilité est encore incertaine.