19/08/09

Les changements climatiques s’accompagnent de catastrophes naturelles et de maladies

Le tsunami de décembre 2004 a créé un vaste terreau fertile a la reproduction des moustiques Crédit image: Flickr/Taekwonweirdo

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J. P. Nairan de l’OMS recommande de se préparer à une multiplication des catastrophes naturelles provoquées par les changements climatiques et favorables aux maladies transmises par les moustiques.

Le changement climatique est désormais une réalité, avec une hausse des températures de l’ordre de 4 degrés Celsius prévue d’ici 2100. Les cyclones tropicaux deviendront probablement plus fréquents et plus intenses, les précipitations plus nombreuses et le niveau des océans montera d’un mètre avec le réchauffement de la surface des océans tropicaux.

Le nombre de catastrophes naturelles, comme la sécheresse et les inondations, devrait également s’accroître avec l’évolution du climat. Elle affectera inévitablement la santé, surtout dans le monde en développement, aggravant ainsi la mortalité due au stress thermique, aux maladies diarrhéiques et à la malnutrition.

L’incidence des maladies transmises par les moustiques, en particulier, sera probablement différente.

Dans certaines régions tropicales, les cyclones et les inondations créent un terreau fertile pour les moustiques vecteurs de la dengue et du paludisme. Les populations pauvres installées dans les régions côtières sont particulièrement exposées à la montée du niveau des océans et son corollaire qui est la menace que représentent les maladies transmises par les moustiques.

Hausse de la prévalence des maladies

En Asie du Sud et en Asie du Sud-Est, la décennie passée a été marquée par de nombreuses catastrophes, notamment des inondations dévastatrices dans les Etats indiens du Gujarat et de Bombay, des super cyclones toujours en Inde, au Bangladesh et en Birmanie, ainsi que des tsunamis qui ont frappé l’Inde, l’Indonésie, le Sri Lanka et la Thaïlande. L’impact des cyclones sur les maladies transmissibles par les moustiques varie d’une région à l’autre, en fonction de l’environnement et du mode de vie des populations.

Mis à part les super cyclones, tous ces événements ont contribué à accroître l’incidence des maladies transmises par les moustiques, surtout le paludisme. En Inde, les inondations ont perturbé l’offre des soins de santé et entraîné une reproduction abondante des moustiques, provoquant des épidémies de paludisme. La sécheresse a également été à l’origine d’épidémies au Sri Lanka.

Le tsunami qui a frappé la région en décembre 2004 a également créé un vaste terreau fertile pour la reproduction des moustiques, perturbé les services de santé et fait plus de 1,6 millions de sans abris. Ce qui a entrainé une forte hausse de l’incidence du paludisme aux Îles Andaman entre janvier et avril 2005.

Le chikungunya, une maladie qui avait quasiment disparu en Inde, est réapparue dans les régions méridionales du pays, se répandant, au mois de mai 2007, à tous les districts de l’Etat du Kérala. Bien que les facteurs de cette résurgence n’aient pas été identifiés, les changements climatiques sont à l’origine de la reproduction et de la survie des moustiques Aedes.

Le moment est venu de tirer les leçons…

Le Rapport Stern sur l’économie et les changements climatiques, publié par la Grande-Bretagne en 2006, insistait sur le fait que si des mesures d’atténuation et d’adaptation n’étaient pas prises, les dommages causés par les changements climatiques iraient au-delà des simples coûts économiques.

Plusieurs leçons peuvent cependant être tirées des événements passés. Dans un premier temps, nous devons rassembler les informations sur nos expériences des catastrophes naturelles, passer en revue les solutions qui ont marché et celles qui n’ont pas marché, pour contribuer à l’orientation de l’action à venir. Les épidémies de paludisme qu’ont connues les Îles Andaman ont été combattues au moyen de vastes campagnes de détection et de traitement, des mesures de lutte antivectorielle et des services de reconstruction.

Le Bureau régional de l’OMS pour l’Asie du Sud-Est travaille déjà à l’analyse des liens entre les changements climatiques et la santé, la préparation de protocoles de recherche sur l’impact probable des changements climatiques sur les maladies transmissibles telles que la diarrhée et le cholera, ainsi que les maladies transmises par les moustiques, et l’évaluation des plans de réponse. L’OMS testera ces protocoles à Calcutta (Inde) et à Thimpu (Bhoutan) à la fin de cette année, et envisage dans le même temps le lancement de travaux de recherche dans six ou sept autres pays de la région l’an prochain.

…et se tenir prêts

D’autres chercheurs et décideurs politiques devraient suivre cet exemple. Les données dont nous disposons sur les liens entre les changements climatiques et les maladies transmissibles par les moustiques sont encore au stade exploratoire. Il nous faut davantage de données. Et de meilleurs modèles. Les modèles mondiaux ne contribuent pas aux évaluations régionales ou nationales car pas assez travaillés. Les différents pays peuvent étudier les données sur les épidémies passées et évaluer l’incidence probable de l’effet des changements climatiques sur les maladies transmissibles par les moustiques, pour ce qui est à la fois des nouvelles régions à risque et des populations susceptibles d’être affectées.

Pour susciter la volonté politique nécessaire pour s’attaquer aux liens entre changements climatiques et maladies transmissibles par les moustiques, nous devons trouver des solutions aux questions pratiques pertinentes qui se posent aux hommes politiques, comme établir des projections socioéconomiques et des estimations des coûts des mesures d’adaptation par rapport aux avantages ou aux pertes économiques provoqués par les changements climatiques.

Les pays ont également besoin d’autres données pour identifier les victimes potentielles et évaluer le niveau de préparation actuel. Il leur faut également évaluer les infrastructures sanitaires mises en place, identifier les outils d’intervention les plus récents disponibles et fournir les moyens nécessaires à la lutte contre l’impact des changements climatiques sur la santé. Les gouvernements doivent évaluer la capacité des communautés locales à faire face aux catastrophes afin de déterminer les moyens additionnels nécessaires.

Grace à la recherche, aux outils et à l’engagement politique adéquats, les régions telles que l’Asie du Sud et l’Asie du Sud-Est peuvent se préparer à l’explosion des maladies transmissibles par les moustiques induite par les changements climatiques. Mais il faudra des efforts concertés pour développer les capacités de recherche nécessaires à l’évaluation de la menace des changements climatiques et à la modélisation de son impact sur les maladies.

Jai P. Narain, Directeur des maladies contagieuses au Bureau régional de l’OMS pour l’Asie du Sud-Est à New Delhi, en Inde
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