29/12/11

Les monopoles des entreprises privées ‘risquent de dominer l’économie verte’

D'abord, la ruée vers le pétrole, ensuite la ruée vers la biomasse Crédit image: Flickr/Argonne National Laboratory

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[NEW DELHI] La poussée mondiale vers une ‘économie verte’ risque d’être récupérée par les grandes d’entreprises privées qui tenteront de monopoliser le contrôle des ressources naturelles, a averti un rapport.

Dans la dernière ligne droite avant la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio +20), prévue en juin 2012, au Brésil, l’accent est de plus en plus mis sur le concept d’une économie verte, largement considérée comme un moyen de s’attaquer aux défis environnementaux, dont les changements climatiques, les problèmes liés à la pêche et la sécurité de l’eau.

Or, un rapport publié au début du mois (14 décembre) a averti que les entreprises multinationales, se positionnant dans un futur post-pétrochimique, pourront récupérer cette idée à leur avantage et prendre le contrôle des ressources en biomasse qui finiraient par remplacer le pétrole comme matière première pour l’énergie et les produits industriels.

Ce rapport, publié par une organisation internationale non gouvernementale Groupe d’Action sur l’érosion, la technologie et la conservation (Groupe ETC), au Canada, affirme que la majeure partie de cette biomasse se trouve dans des pays en développement, où elle est gérée par des paysans pauvres, des habitants des forêts, des communautés de pêcheurs et d’éleveurs – tous dépendent de la biomasse pour leurs moyens de subsistance.

Le rapport exhorte les pays en développement à élaborer des politiques qui sauront les protéger contre de tels empiétements.

S’ils ne le font pas, ils risquent d’être "séduits" par la promesse de solutions rapides d’ordre technologique, qui apparaissent comme "un expédient politique" alternatif pour sauver le climat. Le rapport juge que "les solutions technologiques ne sont pas capables de faire face aux problèmes systémiques de pauvreté, de faim et de crises environnementales".  

"En l’absence d’une gouvernance et d’une surveillance gouvernementale efficaces et socialement responsables et de la part du gouvernement, l’économie basée sur la biomasse va entraîner une dégradation plus poussée de l’environnement, une perte sans précédent de biodiversité et la perte d’autres biens publics communs".

Les auteurs du rapport déclarent ne pas rejeter le concept d’économie verte, mais préconisent que les pays construisent des économies durables fondées sur les ressources biologiques locales en utilisant des modèles économiques qui soient nouvelles, plus socialement et écologiquement durables.

Hoysala Chanakya, chercheur principal au centre pour les technologies durables à l’Indian Institute of Science, affirme que le rapport a eu raison de souligner qu’il y avait un potentiel pour des rachats d’entreprise en l’absence de soutien politique adéquat et que les pays en développement ont besoin de se doter de politiques visant à garantir que les ressources publiques ne subissent pas le joug des monopoles.

Il ajoute que l’hypothèse selon laquelle les avancées technologiques dans les systèmes de biocarburants à base d’algues ou de plantes, par exemple, permettrait de résoudre les problèmes environnementaux, est basé en partie sur une exagération médiatique.

"Les technologies [à base de biomasse] sont encore jeunes,"  affirme-t-il, et sont responsables de déchets organiques qui peuvent être polluantes.

D’autres experts en politique de développement durable en Inde ont suggéré que la solution à certains des problèmes prévus par l’ETC Group serait de décentraliser les programmes alimentaires et de sécurité énergétique et d’encourager une agriculture centrée sur les agriculteurs modestes.

Pour Rajeswari Raina, chercheur à l’Institut national des sciences, de technologie et des études de développement, au lieu d’adopter "de larges programmes englobant une application généralisée de l’énergie solaire ou l’hydrogène," les pays en développement devraient évoluer vers des programmes d’alimentation et de sécurité énergétique décentralisés, gérés localement et qui soient enracinés dans leurs environnements uniques locaux.

Ambuj Sagar, professeur d’études politiques à l’Institut indien de technologie, est d’accord: "Nous avons besoin d’une histoire différente, qui valorise les moyens de subsistance des petits agriculteurs des pays en développement plutôt que la production alimentaire à moindre coût, ou la protection des intérêts des agriculteurs dans les pays industrialisés grâce aux subventions."

 "Les systèmes alimentaires et agricoles du secteur privé et ceux axés sur le marché sont peu susceptibles d’offrir ce type de résultat, puisque ce n’est pas là l’objectif principal de ces acteurs et de ces institutions."

Lien vers le rapport complet