12/01/14

Des chercheurs de l’IITA produisent des semences d’ignames “dans l’air”

Yams_598
Crédit image: Flickr/IITA Image Library

Lecture rapide

  • La nouvelle technique ouvre la voie à la propagation de semences d’igname saines pour de meilleures récoltes
  • Si la technologie a déjà été expérimentée dans la production d’autres tubercules, notamment les pommes de terre, c’est la première fois qu’elle est utilisée pour la production de semences d’ignames
  • La production en plein air de semences d’igname comporte néanmoins un inconvénient qui risque de freiner son développement : le besoin d’une alimentation électrique continue, dans des pays frappés par une crise énergétique aiguë

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

[IBADAN] La nouvelle technique présente deux avantages majeurs : l’augmentation de la quantité d’igname susceptible d’être produite sur un terrain réduit (ratio tonnes d’ignames sur un hectare) et la production de semences de meilleure qualité.

Les  chercheurs sont partis du principe que toute plante peut pousser dans un système aéroponique. Le système de culture aéroponique est un processus qui permet de faire pousser des plantes en plein air ou dans un environnement humide sans recourir au sol.

C’est ainsi que la production de la semence d’igname a  été testée dans le cadre du projet  Yam improvement for Income and Food Security in West  Africa – Projet d’amélioration de l’igname pour la sécurité des revenus et de l’alimentation en Afrique de l’ouest (YIIFSWA) à l’IITA -, financé par la Fondation Bill et Melinda Gates.

Les équipes de chercheurs de l’IITA ont donc pris des tiges d’igname âgées de 120 jours qu’elles ont découpées et replantées dans de petits pots en plastiques pour qu’elles puissent germer des racines.

Les petites plantes ainsi obtenues ont  été introduites dans un système aéroponique pendant quarante-huit heures.

Les tiges produites ont été récoltées quatre mois plus tard, puis plantées dans d’autres pots six mois plus tard. L’expérience a été reprise plusieurs fois, avec rajout d’autres substances nutritives telles que des engrais, du potassium et du phosphate en solution aqueuse.

Les plantes  obtenues  après quatre mois de croissance dans le système aéroponique pesaient entre 0,2  et 5 grammes. Un système d’irrigation projette de l’eau mélangée  avec des substances nutritives telles que des engrais et du potassium sous les étagères, pour irriguer ces tiges  toutes les quarante-cinq minutes.

“Il est trop tôt de parler de révolution, mais les résultats sont très encourageants”

Norbert Maroya, IITA

Norbert Maroya, ingénieur agronome à l’Institut International de Recherche Tropicale (IITA) et responsable du programme de recherche, explique à SciDev.Net que l’avantage principal de la technique réside en ceci que “les tubercules  obtenues après l’expérience sont saines, dénudées de toutes maladies et poussent avec vigueur.”

Selon  lui, “la nouveauté de l’expérience réside dans la méthode de production des semences d’ignames. En outre, cette technologie permettra de multiplier plus rapidement les semences qu’auparavant et aussi de ne pas occuper une trop grande superficie dans la production de semences, étant donné qu’elle se passera du sol. ”


Une technique coûteuse

Norbert Maroya estime en outre que l’aéroponie permet de produire des semences saines qui augmenteront la production quantitative et qualitative d’igname.

“A l’étape actuelle, il est trop tôt de parler de révolution, mais les résultats sont très encourageants”, a-t-il ajouté.

Si la culture de semences d’igname en aéroponie présente des avantages évidents en matière de productivité, en revanche, la mise en œuvre de la technologie coûte cher, dans la mesure où elle exige une alimentation électrique en continu, notamment pour pouvoir irriguer les semences toutes les quarante-cinq minutes.

Or, selon Bamidélé Omichessan, fermier basé dans l’Etat d’Oyo, au Nigeria, la plupart des pays de la région sont frappés depuis une décennie par une crise énergétique sans précédent. « Il sera donc difficile de compter sur une alimentation continue en électricité et l’achat d’un groupe électrogène, sa maintenance et son approvisionnement en fuel ne pourront que diminuer la rentabilité de l’opération”, explique-t-il à SciDev.Net.

Mais pour Norbert Maroya, “l’un des objectifs de l’expérimentation est, dans un premier temps,  de pouvoir vulgariser ce système et de mettre la technologie à la disposition des fermiers. Nous avons tout le temps, avec d’autres partenaires stratégiques, de réfléchir à une meilleure rentabilité et de pallier au défi technique soulevé, entre autres, par l’électricité.”

Dans cette optique, l’IITA  affirme rechercher  des partenariats avec le secteur privé  dans la production  des semences pour l’expérimentation  du système de culture aéroponique.

En Afrique de l’ouest l’igname joue un rôle important dans la sécurité alimentaire et représente une activité économique pour  60 millions de personnes. Environ 48 million de tonnes  d’ignames (93% de la production mondiale) sont cultivées sur 4 millions d’hectares par an dans la sous-région, principalement dans cinq pays, à savoir le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Nigeria et le Togo.